Khaled Mechal, ex-chef politique du Hamas, pressenti pour en reprendre la tête
DIA-31 juillet 2024: Khaled Mechal, pressenti pour reprendre les commandes politiques du Hamas, est devenu connu à travers le monde en 1997 après que des agents israéliens l’ont empoisonné dans une rue située devant son bureau dans la capitale jordanienne Amman.
L’ordre d’assassinat de ce haut représentant du Hamas, donné par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, a enragé le roi jordanien de l’époque, Hussein, qui a menacé de pendre les assaillants et de rompre le traité de paix entre la Jordanie et Israël si l’Etat hébreu ne remettait pas l’antidote permettant de sauver la vie de Khaled Mechal.
Israël a obtempéré et a également accepté de libérer le fondateur du Hamas, Cheikh Ahmed Yassine, avant d’assassiner ce dernier sept ans plus tard dans la bande de Gaza.
Pour leurs partisans, Khaled Mechal et les autres dirigeants du Hamas sont des combattants de la libération, avec pour objectif de mettre fin à l’occupation israélienne des territoires palestiniens, tentant de réussir là où la diplomatie internationale a selon eux échoué.
Khaled Mechal, 68 ans, est devenu le chef exilé du bureau politique du Hamas l’année ayant précédé la tentative d’assassinat israélienne à laquelle il a réchappé.
Dans ce cadre, il représentait le groupe palestinien lors de réunions avec des gouvernements étrangers à travers le monde, libre de ses déplacements, contrairement aux restrictions imposées par Israël à d’autres représentants du Hamas.
RELATIONS PARFOIS DÉLICATES AVEC L’IRAN
Selon des sources au sein du groupe palestinien, Khaled Mechal devrait être choisi pour succéder à Ismaïl Haniyeh, abattu mercredi matin alors qu’il se trouvait en Iran, un assassinat attribué à Israël que Téhéran et le Hamas ont promis de venger.
Israël a tué ou tenté de tuer plusieurs dirigeants et membres du Hamas depuis la création du groupe en 1987, lors de la première Intifada (soulèvement) contre l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.
Khalil al-Haya, basé au Qatar où se trouve le siège du bureau politique du Hamas, est aussi considéré comme une option alors qu’il a dirigé la délégation chargée des négociations indirectes avec Israël sur un cessez-le-feu à Gaza. Le haut représentant du groupe palestinien est très apprécié par Téhéran et ses alliés dans la région.
Les relations entre Khaled Mechal et l’Iran ont été crispées par le soutien apporté par le premier nommé à la révolte majoritairement sunnite contre le président syrien Bachar al-Assad en 2011.
Personnalité centrale du Hamas depuis la fin des années 1990, bénéficiant d’une sécurité relative du fait de son exil alors qu’Israël oeuvrait à « neutraliser » d’autres cadres du groupe palestinien basés à Gaza, Khaled Mechal a pris la tête du Hamas après les assassinats successifs de Cheikh Ahmed Yassine en 2004 puis de son successeur Abdel-Aziz Al-Rantissi quelques mois plus tard.
GOUVERNANCE PALESTINIENNE
Comme d’autres avant lui, Khaled Mechal a tenté de trouver un équilibre crucial entre une position plus pragmatique à l’égard d’Israël dans le but d’obtenir un Etat palestinien ou de continuer à combattre, alors que la charte de 1988 du Hamas appelle à la destruction d’Israël.
S’il a rejeté par le passé l’idée que le Hamas, qui a envoyé des kamikazes en territoire israélien dans les années 1990 et 200, scelle un accord de paix permanent avec Israël, Khaled Mechal s’est dit disposé à accepter un Etat palestinien composé de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est comme solution temporaire en échange d’un cessez-le-feu sur le long terme.
L’attaque du 7 octobre dernier, lors de laquelle 1.200 personnes ont été tuées et quelque 250 autres enlevées selon les autorités israéliennes, a fait clairement comprendre les priorités du Hamas.
En réponse, Israël a décrété le siège total de la bande de Gaza, tuant depuis lors plus de 39.000 Palestiniens selon les autorités sanitaires locales, dévastant la quasi-totalité de l’enclave et provoquant une grave crise humanitaire.
Khaled Mechal a déclaré que l’attaque du 7 octobre a permis de remettre la cause palestinienne au centre des discussions mondiales, exhortant par ailleurs les arabes et musulmans à se joindre à la lutte contre Israël.
Seuls les Palestiniens décideront de la gouvernance à Gaza à l’issue du conflit actuel, a-t-il dit, alors qu’Israël entend éradiquer le Hamas pour l’empêcher d’avoir un rôle quelconque à Gaza. Benjamin Netanyahu a également affiché son opposition à une gouvernance de l’Autorité palestinienne, qui dispose de prérogatives limitées en Cisjordanie occupée.
UNE VIE LOIN DES TERRITOIRES PALESTINIENS
Né à Silwad, ville de Cisjordanie située à proximité de Ramallah, Khaled Mechal a passé l’essentiel de sa vie hors des territoires palestiniens, sa famille ayant déménagé au Koweït lorsqu’il était enfant.
A 15 ans, il a rejoint les Frères musulmans, le plus ancien des groupes islamistes du Moyen-Orient, dont le rôle a été prépondérant dans la création du Hamas.
Khaled Mechal a été enseignant avant de devenir un porte-voix du Hamas à l’étranger pendant de nombreuses années, alors que des dirigeants du groupe palestinien étaient enfermés pendant de longues périodes dans des prisons israéliennes.
Il était en charge de récolter des financements internationaux quand il a réchappé à Amman en 1997 à la tentative d’assassinat israélienne menée en représailles à une attaque à la bombe contre un marché de Jérusalem, imputée au Hamas, dans laquelle 16 personnes ont été tuées.
En ordonnant au Mossad de procéder à son assassinat, Benjamin Netanyahu, qui effectuait à l’époque son premier mandat en tant que chef du gouvernement israélien, a joué sans le vouloir un rôle important dans le statut dont a alors joui Khaled Mechal au sein du Hamas.
Les assaillants présumés de Khaled Mechal ont été arrêtés par la police jordanienne, Israël a été contraint de remettre l’antidote du poison injecté à Mechal, et celui-ci est devenu héros de la résistance palestinienne.
Amman a par la suite décidé de fermer le bureau du Hamas et d’expulser Khaled Mechal au Qatar. Mechal a ensuite déménagé en 2001 en Syrie, d’où il a dirigé le Hamas à compter de 2004.
FRAGILISÉ PAR SA VOLONTÉ DE RAPPROCHEMENT AVEC ABBAS
Il a quitté la capitale syrienne Damas en janvier 2012, dans un contexte de répression par le régime Assad des sunnites impliqués dans la rébellion à l’encontre du dirigeant.
Khaled Mechal, qui partage désormais son temps entre Doha et Le Caire, a vu sa position au sein du Hamas être fragilisée par son départ soudain de Syrie, alors que les relations avec Damas et Téhéran sont vitales au groupe palestinien et avaient permis à Mechal de se hisser à sa tête.
Cette situation a profité à des cadres basés à Gaza, berceau du Hamas, qui ont commencé à asseoir leur autorité.
Khaled Mechal avait admis lui-même, dans des commentaires à Reuters, que son départ de Syrie avait affecté ses relations avec les principaux soutiens du Hamas, dont l’Iran, son fournisseur d’armes, considéré par Israël comme son plus grand ennemi.
C’est en décembre 2012 que Khaled Mechal s’est rendu pour la première fois dans la bande de Gaza, à l’occasion du 25e anniversaire du Hamas, prononçant un discours. Il ne s’était plus déplacé dans des territoires palestiniens depuis son départ de Cisjordanie à l’âge de 11 ans.
Alors que le Hamas a repris à l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas le contrôle de la bande de Gaza en 2007 à l’issue d’une courte guerre civile, Khaled Mechal s’est retrouvé en délicatesse avec des dirigeants du Hamas basés dans l’enclave pour sa volonté de mener une réconciliation avec Abbas.
Il a exprimé alors sa volonté de quitter ses fonctions de chef politique du Hamas. Son adjoint, Ismaïl Haniyeh, a été élu en 2017 pour le remplacer. Khaled Mechal a pris la tête, quatre ans plus tard, du bureau du Hamas en charge de la diaspora palestinienne. (Nidal al-Mughrabi; rédigé par Jean Terzian)