Coupures des réseaux sociaux: la ministre Houda Faraoun tente de se justifier
DIA-21 juin 2016: Après la polémique sur la coupure des réseaux sociaux, qui a noirci l’image de l’Algérie dans le monde, la ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, Imane-Houda Faraoun, tente de se justifier en choisissant de s’exprimer exclusivement sur l’agence gouvernementale APS. Curieusement la ministre choisi de s’exposer seule dans cette polémique alors que la décision a été prise par plusieurs départements du gouvernement dont le ministère de l’éducation. Voila ses explications:
« Dans l’objectif de protéger nos candidats au baccalauréat contre les tentatives de déstabilisation via de faux sujets et des rumeurs malveillantes, nous avons procédé, en relation avec l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications, ainsi que l’ensemble des opérateurs de télécommunication, à la restriction de l’accès aux principaux réseaux sociaux pendant des horaires limités liés à ces examens », a précisé Mme Faraoun dans un entretien à l’APS .
Selon la ministre, ces mesures ont permis « l’avortement de tentatives criminelles qui visaient à mettre en péril le devenir des milliers de candidats au baccalauréat ».
Concernant les désagréments causés par cette mesure aux usagers d’Internet, la ministre a souligné que le devenir des candidats au baccalauréat « nous oblige à faire le sacrifice et à céder un peu de notre bien-être personnel pour contribuer au bon devenir de toute la société ».
« Je suis certaine qu’en dépit des réactions compréhensibles de certains mécontents de nos concitoyens, les Algériens, connus pour leurs sens de citoyenneté et de responsabilité, qui se révoltent contre la fraude, qui souhaitent voir nos enfants à l’abri de toute surenchère, qui militent pour l’égalité des chances entre candidats, sont satisfaits de ces mesures et acceptent, dans la bonne humeur, d’être privés quelques heures du loisir de surfer sur Facebook ou autre« , a-t-elle souligné.
Toutefois, la ministre a tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas de « coupure d’Internet, mais simplement d’une réduction de trafic pendant la première moitié du premier examen », afin, a-t-elle expliqué, de « déjouer les desseins de certains groupuscules qui activent pour perturber le déroulement des épreuves« .
Elle a également fait savoir que le blocage pendant la nuit ne concernait que les réseaux sociaux, affirmant que le gouvernement avait « toute latitude » de prendre des « mesures conservatoires pour des situations d’urgence, tant que l’intérêt public l’exige ».
En réponse à ceux qui disent que l’Algérie a marqué « une première du genre » en bloquant les réseaux sociaux, la ministre a indiqué que l’Algérie « ne fait pas exception, car il y a eu des restrictions de certains réseaux sociaux dans d’autres pays pour diverses raisons, y compris celles liées au baccalauréat ».
« Il faut rajouter que les réseaux sociaux ne sont qu’une partie de ce qu’on appelle les applications OTT (Over The Top) qui utilisent les réseaux déployés par les opérateurs de télécommunications à des fins commerciales et sans contrepartie pour ceux-là, aboutissant à la saturation de la bande passante en plus de la concurrence sur le segment de la voie pour les propriétaires mêmes des réseaux », a-t-elle précisé.
« La problématique de leur existence fut l’objet de batailles entre opérateurs de télécommunications, sociétés civiles et opérateurs OTT dans la quasi-totalité des pays européens, américains et certains pays asiatiques », a-t-elle relevé, ajoutant qu’il s’agit, en l’occurrence, de la remise en question du principe de la neutralité du net.
La ministre a affirmé que divers pays « ont autorisé leurs opérateurs de télécommunications à bloquer temporairement ou définitivement les OTT, voire même à négocier avec ceux-là les conditions tarifaires du maintien de service« .
Répondant à des experts qui prétendent que le blocage des réseaux sociaux lors de l’examen du baccalauréat n’était pas efficace, du moment que les internautes accèdent via les VPN (virtuel private network), la ministre a fait savoir que le blocage des VPN « nuirait sérieusement aux échanges Internet non incriminés, notamment les courriers électroniques« .
« Le blocage des VPN, qui sont des réseaux virtuels privés, donc cryptés, se fait moyennant le filtrage de tout le trafic crypté, et nuirait donc sérieusement aux échanges Internet non incriminés, notamment les courriers électroniques« , a expliqué Mme Faraoun.
« Nous avons donc préféré surseoir à ce mode de blocage », a-t-elle affirmé. Toutefois, Mme Faraoun a reconnu que cette « machination » qui vise à généraliser l’usage du VPN parmi les jeunes, « dépasse de loin le stade de simples fraudeurs ordinaires ».
Dans ce contexte, la ministre a assuré que « des mesures sévères seront prises à l’encontre des fraudeurs utilisant ces techniques ainsi que les artisans de cette machination ».
Elle a indiqué, en outre, « regretté » le fait de voir des médias inciter les jeunes à en faire usage, précisant que l’usage de proxy (composant logiciel informatique jouant le rôle d’intermédiaire entre deux hôtes pour faciliter ou surveiller leurs échanges – NDLR) pour contourner le blocage est « hautement préjudiciable » à l’intégrité des données personnelles stockées sur leurs ordinateurs ou smartphones.
Enfin, Mme Faraoun a tenu à adresser un message aux candidats du baccalauréat en affirmant « avoir toujours eu et continue à avoir confiance en la jeunesse algérienne qui s’est toujours montrée capable de relever les défis les plus ardus ».
« Il nous incombe à tous, pouvoirs publics, société civile, familles, parents d’élèves et médias, de travailler ensemble pour que le travail de nos enfants puisse se faire dans la sérénité et les encourager à redoubler d’efforts pour mériter le passage à l’université, car c’est eux la fierté, l’espoir et l’avenir de notre nation et le garant de son existence », a-t-elle conclu.
Amir Hani/ APS