En crise avec Ottawa : Les Emirats arabes unis, le Bahreïn et l’Autorité Palestinienne soutiennent Riyad
DIA-06 août 2018: L’Arabie saoudite suspend tous ses programmes d’échanges étudiants avec le Canada et va déplacer tous ceux et celles qui y avaient entrepris des études vers d’autres pays, rapporte la chaîne de télévision saoudienne Al-Arabiya. Il s’agirait d’une nouvelle salve dans le conflit diplomatique entre Ottawa et Riyad.
Le royaume wahhabite a annoncé dimanche soir l’expulsion de l’ambassadeur canadien à Riyad, le rappel de son propre ambassadeur à Ottawa et la suspension de toute nouvelle transaction commerciale avec le Canada et de tout nouvel investissement dans le pays.
Le tout a été présenté comme une réplique à des tweets publiés jeudi par la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, puis vendredi par son ministère après l’arrestation de la militante pour les droits des femmes Samar Badawi.
Samar Badawi est la soeur de Raif Badawi, incarcéré depuis plusieurs années en Arabie saoudite et dont la famille est réfugiée à Sherbrooke, au Québec.
Très alarmée d’apprendre l’emprisonnement de Samar Badawi, la sœur de Raif Badawi, en Arabie Saoudite. Le Canada appuie la famille Badawi dans cette difficile épreuve, et nous continuons de fortement appeler à la libération de Raif et Samar Badawi.
Dans une déclaration dimanche sur Twitter, le ministère saoudien des Affaires étrangères a pourfendu ces commentaires en provenance du Canada, dénués selon lui de tout fondement, en dénonçant une « ingérence flagrante » dans ses affaires internes et un « affront inacceptable » envers son processus judiciaire.
Les « soi-disant activistes de la société civile » dont il est question, affirme le ministère, sont « dûment détenus » pour des crimes reconnus par la loi saoudienne. « Il est très regrettable que les mots « libération immédiate » figurent dans la déclaration canadienne », ajoute-t-elle. Cette expression a été utilisée dans le tweet en anglais du ministère.
Dimanche soir, Affaires mondiales Canada a réagi en se disant « sérieusement inquiet des rapports par les médias » et demandant « plus de lumière sur la récente déclaration faite par le Royaume d’Arabie saoudite. »
Le Canada va toujours défendre la protection des droits de la personne, notamment les droits des femmes, et la liberté d’expression dans le monde. Notre gouvernement n’hésitera jamais à promouvoir ces valeurs et nous croyons que ce dialogue est critique en diplomatie internationale.
Déclaration publiée par bureau de la ministre Freeland
Déclaré persona non grata par l’Arabie saoudite et sommé de quitter le pays dans les 24 heures, l’ambassadeur canadien Dennis Horak n’a pas vraiment eu à quitter le Royaume wahhabite. CBC a appris lundi qu’il était en fait en vacances à Toronto depuis trois semaines.
Des appuis de part et d’autre
Dans une entrevue accordée dimanche soir à CBC, la femme de Raïf Badawi, Ensaf Haidar, n’a pas caché être « surprise » et « alarmée » par les derniers développements. Elle dit ne pas savoir quel impact cela aura sur son mari, qui purge une peine de 10 ans de prison pour des propos tenus sur un blogue. Il a aussi été condamné à 1000 coups de fouet, dont 50 lui ont été administrés.
J’attends depuis six ans. Mes enfants attendent depuis six ans. J’attends toujours et, malheureusement, je ne sais pas quand je vais pouvoir arrêter d’attendre.
Mme Haïdar demande au Canada de ne pas baisser les bras dans ce dossier. « J’aimerais que le Canada continue à faire pression » sur Riyad, a-t-elle déclaré.
Dans un communiqué publié lundi, Amnistie internationale demande aux grandes puissances d’imiter le Canada et de « prendre la parole en faveur des défenseurs des droits humains détenus en Arabie saoudite ».
« Des États qui ont une influence significative en Arabie saoudite – comme les États-Unis, le Royaume-Uni et la France – sont déjà demeurés silencieux bien trop longtemps », écrit l’organisation. « Le monde ne peut pas continuer de regarder ailleurs pendant que cette campagne de persécution sans relâche des défenseurs des droits de la personne se poursuit. »
Il est maintenant temps que d’autres pays se joignent au Canada en augmentant la pression sur l’Arabie saoudite pour qu’elle libère les prisonniers de conscience immédiatement, et sans condition, et mette fin à sa répression envers la liberté d’expression dans le pays.
L’Arabie saoudite a pour sa part obtenu le soutien des Émirats arabes unis, de Bahreïn et de l’Autorité palestinienne, selon Al-Arabiya.