Les dix héros du cinéma algérien représentés sur la révolution
DIA-26 août 2016: Le héros dans le cinéma est souvent considéré comme une idole dans son pays, une icône pour les médias et surtout une star dans le milieu professionnel. Si le cinéma américain a toujours fait la promotion de ses vedettes et créa ses propres héros, à l’image de Terminator, l’inspecteur Harry, John Mclane, Jason Bourne ou Rambo et des super héros, comme Superman, Batman et Hulk, en revanche dans le cinéma algérien à l’exception de l’Inspecteur Tahar qui fut le seul policier héros dans le 7e art algérien, la majorité de nos héros ont joué dans des films sur la révolution. Les films de guerre ont une emprise idéologique, historique et surtout politique sur les héros des films sur la révolution. Et pourtant les responsables du cinéma en Algérie avaient toujours écarté la notion de héros dans le 7e art algérien considérant que si il y a un héros au cinéma c’est bien le peuple algérien. C’est pourquoi dans la majorité des anciens films, les réalisateurs ont multiplié les héros pour qu’aucun d’eux ne s’illustre et devienne une star. Et pourtant dans le cinéma algérien, il y a certains visages qui se sont imposés et sont devenus grâce à leur interprétation dans les films de guerre, des stars et des vedettes des médias, du peuple et même des gouvernants. L’interprétation d’un rôle de révolutionnaire dépasse parfois le stade culturel ou commercial et certaines vedettes de films révolutionnaires ont été même saluées par des présidents de la république comme Boumediene, Chadli ou Bouteflika. Nous avons sélectionné pour vous, les dix héros du cinéma algérien les plus représentés dans des films sur la révolution. Bien sûr il ya également certains second rôles qui restent éternels dans leurs prestations : C’est le cas de Larbi Zekal, Hassan El Hassani, ou encore Abdelhalim Rais
Keltoum, héroïne du film « le Vent des Aurès » de Mohamed Lakhdar-Hamina (1966)
Keltoum, est sans conteste la première vedette arabe et africaine à monter sur les marches du Festival de Cannes avec Mohamed Chouikh, habillée de son burnous et sa tenue traditionnelle algérienne pour représenter l’Algérie avec le film « Vents des Aurès »en 1966. C’était la première participation de l’Algérie à ce prestigieux festival après l’indépendance. Son interprétation du rôle d’une mère à la recherche de son fils retenu dans un camp de prisonnier ému les jurys. Le film a remporté le prix de la première œuvre pour Lakhdar Hamina en 1966 et lança définitivement sa carrière cinématographique internationale. Keltoum qui est décédée le 11 novembre 2010 à l’âge de 94 ans a poursuivi sa carrière discrètement dans des films importants de la filmographie algérienne : « Hassan Terro » (Mohammed Lakhdar-Hamina, 1968), « Décembre » (Mohammed Lakhdar-Hamina, 1972), « Les folles années du twist » (Mahmoud Zemmouri, 1986) « Hassan Niya » (Ghaouti Bendeddouche, 1989).
Brahim Hadjadj, héros du film « La bataille d’Alger » de Gillo Pentecorvo (1966)
Le héros de « la bataille d’Alger » de Gillo Pentecorvo, Brahim Hadjadj a été découvert par hasard dans la rue d’Alger par les équipes de casting de la production. Son visage et ses traits durs correspondaient parfaitement au portait du véritable Ali La pointe. Malgré le fait que c’était un amateur, le réalisateur italien l’a gardé et l’a doublé par un comédien de théâtre local. Le succès du film lui a vraiment joué des tours, il arrêta son travail dans le service des eaux et décida de se consacrer au cinéma, mais à une seule condition : jouer dans les films sur révolution. Plusieurs réalisateurs algériens lui offrirent cette chance : Ahmed Rachedi dans « l’Opium et le bâton», Amar Laskri dans « Patrouille à l’Est », Lakhdar Hamina dans « Chronique des années de braise ». Mais passé le cinéma sur la révolution dans les années 80, il fût oublié et mourra dans l’anonymat le plus complet dans une petite baraque à Chararba.
Rouiched, héros du film « Hassan terro » de Mohamed Lakhdar-Hamina (1967)
Ahmed Ayad, dit Rouiched, a créé le premier « héros malgré lui » du cinéma algérien : « Hassan Terro », d’abord une pièce théâtrale qui fût jouée durant plus de six mois au TNA, avant d’être adapté au cinéma en 1967 par Mohamed Lakhdar Hamina. Rouiched voulait effacer le rôle peu représentatif de soulard dans le film « la Bataille d’Alger » en 1966. En 1972, il a décidé de jouer un rôle totalement opposé dans le film d’Ahmed Rachedi «l’Opuim et le baton», celui d’un harki. Malgré la complexité du rôle, parfaitement interprété, ce profil n’a jamais bousculé sa popularité et Rouiched décida d’enchaîner avec des suites des aventures Hassan : « L’évasion de Hassan Terro » réalisé par Mustapha Badie, dans le registre de révolutionnaire et ensuite dans le registre comique post indépendance.
Sid Ali Kouiret, héros du film « L’opium et le bâton » d’Ahmed Rachedi (1972)
L’interprétation de Sid Ali Kouiret dans le film « l’Opium et le bâton» du rôle d’Ali restera jusqu’à la fin de sa vie son meilleur rôle au cinéma. C’est la scène finale où il décida de mourir debout, mais aussi son duo avec Jean Louis Trintignant qui marquèrent à jamais les esprits du public algérien. Et pourtant Sid Ali Kouiret a joué un rôle aussi important sur le plan dramatique dans le film « Décembre » de Mohamed « Lakhdar Hamina». Dans ce film (sans doute le plus fort de Lakhdar Hamina) un huit clos s’engage entre Si Ahmed interprété par Sid Ali Kouiret et le colonel Saint Mérant interprété par Michel Auclair sur le thème de la torture et du sacrifice. Le film « Décembre » n’a pas le même temps de diffusion que « l’Opium et le bâton », ce qui explique le succès de Sid Ali Kouiret dans ce film.
Athmane Ariouet le héros du film « Bouamama » de Benamar Bakhti (1984)
Athmane Arouiet demeurera le seul comédien algérien à avoir jouer le rôle d’un héros d’un film historique dans le cinéma algérien dans le film « Bouamama » de Benamar Bakhti en 1984. Son interprétation dans Bouamama fût tout simplement époustouflante de réalité. Lui qui joua les registres de la comédie française à l’image des pièces de Molière, il fût imprégné pour interpréter le rôle d’un chef historique dans le cinéma algérien. Il faut savoir qu’il a décoché le 1er prix de diction en langue française. Il a été encouragé par le professeur français Henri Vangret, qui était l’élève du grand Gérard Philippe. Mais c’est ensuite son passage au théâtre de Mustapha Kasdarli, Taha Laâmiri et Allal Mouhib, qu’il maîtrisa l’art de la comédie. C’est justement cette maîtrise des registres qu’il a pu passer aisément du registre du drama historique à la comédie burlesque. Ayant refusé de travailler depuis 1999, Athmane Ariouet a perdu l’occasion d’interpréter plusieurs importants dans son registre.
Hassan Kachach, le héros du film « Ben boulaid » d’Ahmed Rachedi (2008)
Médecin de formation, c’est en 1992 que Hassan Kachach rencontre Ahmed Rachedi, qui lui propose un rôle dans un film «C’était la guerre » co-réalisé par le cinéaste français Maurice Failevic. Après un passage dans le dramatique dans le film de Mohamed Chouikh, « l’Arche du désert », il retrouve Rachedi pour interpréter la première représentation d’un chef historique de la révolution dans un film algérien : Mustapha Benboulaid. Le film qui est financé par le ministère des Moudjahidines et ouvrira la voie à une série de films sur les héros de la guerre de libération. Comme pour « Ali La pointe », Hassan Kachach a réussi à s’identifier au héros des Aurès, excellent comédien, il a réussi tout de même à se détacher de son personnage révolutionnaire pour travailler sur d’autres rôles et d’autres registres. On le verra dans un film policier « Le commissaire Lob » et une coproduction algéro-tunisienne « L’avenue des palmiers blessés ». Il sera le héros principal dans le dernier film d’Ahmed Rachedi « Les sept remparts de la citadelle », qui sortira en 2017.
Imed Benchenni, le héros du film « Zabana » de Said Ould Khelifa (2012)
Après Benboulaid, un nouveau héros de la révolution qui a été immortalisé au cinéma, est le premier fidai guillotiné par l’armée coloniale, Ahmed Zabana. Pour interpréter ce rôle, le réalisateur a organisé plusieurs castings à travers plusieurs wilayas, pour enfin tomber sur ce jeune de 26 ans, élève du théâtre de Mostaghanem : Imed Benchenni. Et pourtant ce dernier a commencé sa carrière 2002 avec le Slam avec son groupe » New voice ». Après la mort d’un des fondateurs du groupe, il jetta son dévolu pour le thèâtre en faisant partie de la troupe » El Moudja » de Mostaganem. C’est de là qu’a commencé son parcours de comédien, avec « Zabana ». Imed Benchenni a interprété avec perfection le personnage de Zabana, étant comme lui de l’Oranie, il a réussi à s’identifier au personnage. La meilleure scène du film demeure le moment où il écrit la lettre d’Adieu à sa mère, mais surtout la scène de l’exécution (Où la guillotine s’est bloqué deux fois avant de tuer Zabana) qui fut à la fois le sommet du drame et un grand moment d’émotion et de pleurs pour l’ensemble des personnes qui ont travaillé sur cette scène.
Sami Allem, héros du film « Krim » d’Ahmed Rachedi (2015)
Le rôle de Krim Belkacem était destiné pour Sami Allem. Jeune réalisateur engagé, doué d’une grande sensibilité. Ce natif d’Azazga avait commencé à reprendre les pièces de Mohya, dont il adorait la dramaturgie, pour se forger son rôle. Il commença au cinéma dans le film «Si Moh Ou M´hand» de Rachid Benallal. Petit à petit il découvre la magie de l’image. Il réalise un excellent court métrage comique : « Le curieux » en 2006, qui a été mal compris au Festival Amazigh, puis il co-réalisa documentaire « Hnifa » avec Ramdane Iftini en 2011, sur la regrettée chanteuse kabyle. C’est en 2008, il fera connaissance de Ahmed Rachedi, quand celui-ci le convint de jouer le rôle de Krim Belkacem dans le film Mustapha Benboulaid. Même si il ne joua que quelques séquences, c’était assez suffisant pour convaincre le comédien de remplir pour le rôle du premier ministre de la défense algérien du GPRA, une seconde fois pour le biopic de « Krim ». Sami Allem a adopté le rôle fait sur mesure du jeune homme qui est connu pour sa forte personnalité et son engagement. Malheureusement le film n’a pas eu son lot de diffusion comme Benboulaid pour obtenir cette notoriété tant attendue.
Youssef Sehairi, le héros du film « Lotfi » d’Ahmed Rachedi (2015)
Parmi les héros du cinéma algérien qui sont en train de gagner en popularité et expérience il y a le jeune Youcef Sehairi, un ingénieur d’état en électronique qui a décidé de tout largué pour faire de la comédie. Après des débuts dans le 4ème art avec l’association du théâtre de Laghouat, il décide de faire un passage obligé à l’ISMAS, il entama sa carrière professionnelle en tant que comédien dans le feuilleton «Aïssat Idir» du réalisateur jordanien Kamel Laham en 2008. C’est de là que la productrice Samira Hadj Djilani le découvre et le propose pour un rôle dans le feuilleton algéro-Emirati « Dhakirat el-Djassad » du réalisateur syrien Najdat Anzour, adapté du roman de l’écrivaine algérienne Ahlam Mostaghanemi. Mais au cinéma c’est le réalisateur Amar Si Fodil qui lui offre le premier rôle dans son film: «Les jours de cendre». Il a été reconduit dans le nouveau film d’Amar Si Fodil«Le sang des loups», qui sortira prochainement dans les salles. Mais c’est dans son rôle du colonel « Lotfi » d’Ahmed Rachedi, que Youcef Sehairi, brillant et convainquant, gagne le plus en notoriété. D’ailleurs grâce à sa prestation le cinéaste syrien Bassel El khatib l’a choisi pour le rôle principal très important dans le film « Ibn Badis », une prestation qui sera surement attendue par les professionnels.
Khaled Benaissa, le héros du film « Larbi Ben Mhidi » de Bachir Derrais (2016)
En évoquant un héros dont le film n’est pas encore sorti ce n’est pas une « sinécure ». En fait quelques extraits de sa prestation ont été montrée à plusieurs reprises sur des télévisions grâce à une médiatisation offensive de son producteur et réalisateur Bachir Derrais. Khaled Benaissa n’était pas destiné pour le rôle de Larbi Benmhidi. Le producteur avait misé sur Tahar Rahim, mais devant les retards de la production et le programme chargé du comédien franco-algérien, le producteur Bachir Derrais a décidé de tout miser sur le comédien qui a vu sa côte monter depuis son époustouflante prestation dans le film «l’Oranais» de Lyes Salem. Le fils de Slimane Benaissa, qui est architecte de formation, n’a jamais fait une école d’art dramatique. Il s’est forgé tout seul, en faisant des petits rôles, mais c’est dans le film de Benkacem Hadjadj « El manara » qu’il s’est le plus illustré. Il joua dans plusieurs autres films algériens, « Douar Enssa » de Mohamed Chouikh, « Il était une fois l’Oued » de Djamel Bensalah, « Mascarades» de Lyes Salem, « Zabana » de Said Ould Khelifa, « Sotto Vocé» du marocain Kamel Kamel, « Le repenti » de Merzak Allouache. Mais c’est sa prestation dans le film avec Lyes Salem «l’Oranais» qui lui rapporté la notoriété nationale et internationale. Il a réussi même à être meilleur que Lyes Salem qui est réputé pour être un très bon comédien. D’ailleurs, pour l’anecdote, Lyes Salem avait refusé de recruter Khaled Benaissa pour son moyen métrage « Cousines », considérant qu’il n’avait pas l’étoffe d’un bon comédien, avant de se ressaisir quelques années plus tard. Dans les quelques images diffusés par Bachir Derrais, Khaled Benaissa parait intraitable dans son rôle. On le verra également dans le rôle d’un chef de l’ALN s’exprimant en anglais dans le film Sud-africain « Mandela’s Gun » produit et réalisé par John Irvin.