L’expertise Algérienne en débat : L’antiterrorisme piégé par la diplomatie
DIA-08 septembre 2016: Malgré une expertise contre-terroriste avérée, l’Algérie n’arrive toujours pas à capitaliser cet atout sur le plan politique et sécuritaire. La faute à une diplomatie algérienne qui a phagocyté le dossier en le vidant de sa substance.
L’atelier international sur « le rôle de la démocratie dans la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme » qui vient de se tenir à Alger en est l’exemple le plus édifiant. Des discours creux, des expertises qui sentent la naphtaline, des analyses qui datent et une atmosphère ou les partenaires étrangers répètent, poliment, des constats convenus sur la valeur de l’expérience antiterroriste algérienne.
Car depuis que l’Algérie a revêtu le costume de leader, du moins régional, de la lutte antiterroriste globale et transnationale, les choses ont peu évolué dans le marketing politique et médiatique de ce dossier. Les vieux réflexes sont toujours présents, ainsi que des acteurs institutionnels qui désespèrent les experts étrangers. Cela commence au niveau de la Présidence de la République, où Rezzag Barra, chargé du contreterrorisme jusqu’aux arcanes du CAERT en passant par les couloirs feutrés du MAE où la représentation algérienne est défaillante, faute de renouvellement.
Car l’un des défis de la diplomatie algérienne n’est pas de se gargariser de l’expertise algérienne mais bel et bien de l’expliquer et de lui donner du sens. Sur ce plan, la faillite est partagée par tous les acteurs civils de l’antiterrorisme. Depuis que le Président Bouteflika a donné corps à la charte de la Réconciliation Nationale, outil complexe de la lutte contre l’extrémisme, la diplomatie algérienne et ses pendants de la communication n’ont pas su transformer l’essai. Pourtant le Président de la République avait pris en considération, à différentes étapes, les changements structurelles de la politique de la Réconciliation, de la Rahma à la Concorde Civile, mais le service après-vente sur cette question n’a pas fonctionné puisque les partenaires étrangers cherchent toujours à comprendre la recette miracle de Bouteflika qui est déjà exportée en Arabie Saoudite, au Mali, en Libye ou en Jordanie.
Ce n’est pas faute d’expertise sécuritaire car forcément l’Algérie en possède et à tous les niveaux. Si la diplomatie algérienne a anesthésié cette question, la rendant illisible pour nos partenaires, cela est également dut aux anciens réseaux du DRS, particulièrement de la DDSE (les services extérieurs), où l’ancien Général Attafi régnait en maître sur le dossier. Les réseaux crées depuis ne se sont pas renouvelés, paralysant ainsi une action qui se doit plus dynamique sur des défis plus complexes comme Daesh et ses satellites. Le niveau de compréhension technique de l’antiterrorisme existe aussi bien dans le cabinet du MDN, du chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaid Salah qui a su s’entourer d’esprits brillants qu’au sein du nouveau CSS, du Général Tartag, dont la propre expertise technique est une référence auprès des services de renseignements partenaires. Le tout est de les associer plus intiment à la confection d’un discours cohérent en la matière au lieu de laisser ce dossier à la seule rhétorique de diplomates.
Car il ne faut pas se méprendre, les partenaires étrangers ont besoin de l’Algérie et de son expertise antiterroriste et n’ont pas d’autre choix que de caresser notre diplomatie dans le sens du poil afin de ne pas contrarier la coopération sécuritaire brute. Ça c’est la réalité d’aujourd’hui. Et tant que le discours antiterroriste algérien restera lénifiant et remplis de poncifs, emprisonné par des pseudo-experts, la voie algérienne sera à demi audible.
Sihem Sabor