L’ICAN interpelle le gouvernement français pour « faciliter les modalités d’indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires »
DIA-10 avril 2021: L’ICAN interpelle le gouvernement français pour « faciliter les modalités d’indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires »
L’Organisation non-gouvernementale ICAN a interpellé le gouvernement français pour « s’engager à faciliter les modalités d’indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires », menés par la France coloniale dans le Sud algérien et la remise à l’Algérie de « la liste complète des emplacements où ont été enfouis les déchets nucléaires ».
« L’assistance aux victimes et la remise en état de l’environnement doit être une priorité et pour cela, nous recommandons que l’Etat français s’engage sur quatre priorités », a exigé l’ICAN (International campagn to abolish nucelar weapons) dans un document dont l’APS a obtenu une copie.
Il s’agit, selon l’ICAN, lauréate du prix Nobel de la paix en 2017, de « faciliter, pour les populations algériennes, le dépôt des dossiers de demandes d’indemnisation et notamment l’accès aux archives médicales détenues par le service des archives médicales hospitalières des Armées, de remettre aux autorités algériennes la liste complète des emplacements où ont été enfouis les déchets avec leur localisation précise (latitude et longitude), un descriptif des matériels enterrés ».
Il est question aussi, selon l’ICAN, de « publier les données relatives aux zones contaminées par des scories et laves radioactives, étudier avec les autorités algériennes les modalités d’un nettoyage de ces zones et de remettre aux autorités algériennes les plans des installations souterraines du CEA (Commissariat de l’énergie atomique) sous la base militaire de Reggane plateau ».
« Notre campagne attend un engagement fort en faveur des victimes et de la remise en état de l’environnement, notamment suite à nos révélations sur la politique volontaire d’enfouissement de ces déchets », a noté l’ICAN qui fait référence à l’étude qu’elle a co-réalisée avec l’Observatoire des armements, en août 2020, sous le titre « Sous la sable, la radioactivité », ce qui avait permis « de montrer, qu’entre 1960 et 1967, sur les zones d’essais nucléaires du Sahara, en plus de l’impact radiologique des explosions, les autorités françaises ont mis en place une politique volontaire d’enfouissement des matériaux et outils contaminés par la radioactivité », relevant que « depuis, la population du Sud Sahara est soumise à des risques radiologiques ».
Lorsque cette étude a été publiée en août 2020, l’ICAN avait déjà lancé un appel pour « exercer une pression » sur la France en vue de « déterrer » les déchets provenant des explosions nucléaires effectuées dans le Sahara algérien afin d’assurer la sécurité sanitaire des générations actuelles et futures, et préserver l’environnement.
« Le passé nucléaire de la France ne doit plus rester enfoui dans les sables. Il est temps de déterrer les déchets provenant des essais nucléaires pour assurer la sécurité sanitaire des générations actuelles et
futures », avait déjà relevé cette Organisation qui regroupe quelque 570 ONG issues de 105 pays.
Les essais nucléaires français dans le Sahara algérien ont été évoqués lors d’une rencontre, jeudi, entre le général de Corps d’Armée Saïd Chanegriha, chef d’état-major de l’Armée nationale populaire (ANP) et le général d’armée, François Lecointre, chef d’Etat-major des Armées françaises. A cette occasion, le général de Corps d’Armée a évoqué « la problématique liée à la réhabilitation des deux anciens sites d’essais nucléaires français, à Reggane et In-Ikker ».
« Je tiens à évoquer la problématique des négociations, au sein du Groupe algéro-français, au sujet des anciens sites d’essais nucléaires et des autres essais au Sahara algérien, où nous attendons votre soutien, lors de la 17ème session du groupe mixte algéro-français, prévue en mai 2021, pour la prise en charge définitive des opérations de réhabilitation des sites de Reggane et In Ekker, ainsi que votre assistance pour nous fournir les cartes topographiques permettant la localisation des zones d’enfouissement, non découvertes à ce jour, des déchets contaminés, radioactifs ou chimiques », a indiqué le général de Corps d’Armée à son interlocuteur français.
De son côté, le directeur de l’Observatoire des armements en France, Patrice Bouveret, a recommandé le « rapatriement » et le « traitement en France » des déchets radioactifs provenant des essais nucléaires effectués par l’ancienne force coloniale dans le Sud algérien dans les années 1960.
S’exprimant dans un entretien paru jeudi dans le quotidien français Libération, M. Bouveret a affirmé qu' »il faudrait déjà lancer une mission pour nettoyer les sites contaminés et collecter les restes. Il faut bien évidemment affecter des moyens pour cela et, ensuite les déchets nucléaires du Sahara devraient être rapatriés en France et traités dans des sites nucléaires ».
Entre 1960 et 1966, la France coloniale avait effectué cinquante-sept (57) expérimentations et explosions nucléaires, à savoir quatre explosions aériennes dans la région de Reggane, treize explosions souterraines à In Ikker, trente-cinq essais complémentaires à Hammoudia, dans la région de Reggane, et cinq expérimentations sur le plutonium dans une zone à In Ikker, située à 30 km de la montagne où ont eu lieu les essais souterrains.
La première explosion a été réalisée dans la région de Reggane le 13 février 1960, avec une puissance variant entre 60.000 et 70.000 tonnes de TNT. Cette bombe est cinq fois plus puissante que celle lancée sur Hiroshima, selon les experts.
Selon des historiens et experts, ces essais nucléaires dans le sud du pays restent parmi les pires crimes perpétrés durant 132 ans d’occupation destructrice et illustrent la politique génocidaire pratiquée par le colonisateur que la France officielle doit pleinement assumer et reconnaître.