Pourquoi la fédération française veut éviter l’organisation d’un match contre l’Algérie?
DIA-08 septembre 2019: Moins de vingt ans après le match explosif contre la France en 2001, où l’Algérie avait perdu 4 à 1, Djamel Belmadi, l’actuel entraîneur de l’équipe Algérienne, souhaite toujours une revanche contre les bleus, après que le match eut été arrêté à la 75mn suite à un envahissement de terrain des supporters algériens.
Mardi soir lors d’une conférence de presse, à quelques jours du match amical des Fennecs contre le Bénin, Djamel Belmadi a de nouveau exprimé le vœu de « jouer un jour » contre l’Équipe de France. « Ce serait un match de prestige avec une équipe doublement championne du monde. C’est ça que je regarde, l’aspect sportif« , a ajouté le sélectionneur algérien.
Seulement voilà ; les français ne le souhaitent pas. En tout cas pas maintenant. Une rencontre qui serait « bénéfique pour l’Algérie et la France. Le sport est souvent en avance et les deux pays y trouveraient des intérêts« , avait expliqué Noël Le Graët, président de la Fédération française de football (FFF), sur France tv sport.
Présent en 2001 sur la pelouse du Stade de France avec le numéro 19 sur le dos, Djamel Belmadi avait inscrit le but de l’Algérie sur un coup-franc direct dans le temps additionnel de la première mi-temps. L’ancien milieu de terrain de l’Olympique de Marseille, sélectionneur d’une Algérie qu’il a menée à la victoire finale lors de la Coupe d’Afrique des Nations 2019, s’est donc montré enthousiaste pour l’organisation de cette rencontre.
Et si le sélectionneur algérien est confiant, c’est que cette rencontre est envisagée depuis un certain temps. « Depuis que je suis élu, explique Noël Le Graët, je souhaite que l’Équipe de France joue contre l’Algérie. J’ai annoncé à plusieurs reprises vouloir organiser ce match avant la fin de mon mandat en 2020« . Mais aujourd’hui, la perspective d’une rencontre entre les deux nations semble s’éloigner.
Malgré des discussions avec son homologue algérien, Kheïreddine Zetchi, président de la Fédération algérienne de football, lors de l’inauguration de l’exposition « Football et monde arabe, la révolution du ballon rond » à l’Institut du monde arabe en avril dernier, « le projet n’avance pas et j’ai peur que le match n’ait pas lieu avant la fin de mon mandat« , regrette Noël Le Graët.
Pourquoi une telle rencontre très attendue sur le plan sportif, politique mais surtout médiatique et social n’est pas envisageable maintenant?
D’abord le contexte politique est différent. En 2001, le président Bouteflika venait d’effectuer une visite officielle historique et chaleureuse en France, sur invitation du président Jacques Chirac. Le président Bouteflika avait initié plusieurs actions de rapprochement entre les deux peuples. Deux hommes d’Etat ont facilité l’organisation de ce match à l’époque, Moumen Khalifa, qui avait financé toute l’opération aussi bien en Algérie qu’en France et surtout Mohamed Raouraoua, le président de la FAF, qui avait organisé les choses sur le plan sportif.
Mais selon certaines sources en France, cette dérobade des instances françaises est motivée aussi par le refus de l’actuel sélectionneur Didier Deschamps, d’accepter un tel match. Lui qui a écarté la majorité des franco-algériens des Bleus, ne souhaite pas une confrontation avec une équipe composée essentiellement de joueurs français d’origine algérienne qui ont choisi de porter le maillot de l’Algérie. Les responsables du Football français et à leur tête Didier Deschamps sont conscients du potentiel des joueurs algériens et surtout du pouvoir de motivation que possède Djamel Belmadi. Une défaite contre les verts sera inscrite plus comme un exploit historique que comme un exploit sportif. En 2001, même si la France avait battu l’Algérie 4 à 1, le match n’a jamais été comptabilisé comme une défaite historique, mais simplement un match à oublier. Ce qu’on a surtout retenu, c’est « la marseillaise sifflée » et « l’envahissement du terrain du plus grand stade de France, par des centaines de supporters franco-algériens .
Deux décennies plus tard, une nouvelle génération de supporters franco-algériens a envahi les rues des plus grandes villes de France après la victoire des verts à la CAN en Egypte, démontrant une nouvelle fois le grand héritage d’une communauté algérienne mal intégrée en France.
Mieux encore, lors de la finale de l’Euro 2016, remportée par le Portugal contre la France, les franco-algériens sont sortis en masse pour célébrer aux cotés des portugais la victoire contre les bleus. Un choix du cœur mais surtout un choix de la raison contre l’ancienne puissance coloniale qui n’a pas totalement assumé son immigration.
Organiser un match à Paris entre la sélection Algérienne et la sélection Française serait à coup sûr une nouvelle défaite populaire, médiatique et surtout politique pour les français. Même constat pour les bleus en cas de match joué à Alger.
Depuis la fin de la guerre d’Algérie en juillet 1962, deux matchs seulement ont été organisés entre la France et l’Algérie. Le premier était en Finale des jeux méditerranéens d’Alger le 6 septembre 1975 et qui avait vu la victoire de l’Algérie contre la France 3 à 2. Et le second match le 6 octobre 2001 au stade Saint-Denis à Paris et qui avait consacré la victoire de la France contre l’Algérie 4 à 1. Une victoire au goût amer, puisque les supporters algériens avaient envahi le terrain gâchant la fête des français.
Amir Hani