Législatives: Les partis islamistes s’unissent pour ne pas mourir
DIA-01 février 2017: La mouvance islamiste a connu ces derniers temps deux événements que leurs protagonistes ont présentés comme les premiers pas vers son unification tant souhaitée (mais jamais concrétisée). Un certain nombre de partis en faisant partie ont, en effet, décidé de se regrouper. Une décision politique qui a été enclenchée, suite à la mise en place de la nouvelle loi sur les partis, qui stipule qu’un parti sera officiellement dissous, si il ne réalise pas les minimas lors des législatives, soit au moins 4% des suffrages.
Cette nouvelle donne politique a encouragé l’alliance entre le MSP (Mouvement de la société pour la paix), présidé présentement par Abderrezak Mokri, et le FC (Front du changement) d’Abdelmadjid Menasra, qui se veut comme un retour au MSP d’avant les grandes scissions qui ont suivi son retrait, au lendemain du déclenchement du mal-nommé « Printemps arabe», de l’Alliance présidentielle. Et l’Union pour Ennahda, la justice et l’édification (UEJE), une avancée en direction de la recomposition du parti Ennahda originel, une formation lancée en 1989 par Abdallah Djaballah, l’actuel leader incontesté du FJD (Front pour la justice et le développement) : deux de ses composantes, le FJD et l’actuel Ennahda que dirige, présentement, Mohamed Douibi, en sont, en effet, issues. Ce qui en lui-même constitue déjà une claire remise en cause du caractère stratégique donné à ces deux événements par leurs protagonistes respectifs : le retour aux « entités anciennes » constituant, pour nombre d’observateurs, un simple retour à des divisions anciennes (de la mouvance islamiste). Des divisions qui, à l’évidence et de ce fait, ont toutes les chances de se creuser davantage. Certains éléments le laissent, en effet, clairement supposer. Le plus apparent est « l’identité » de la troisième composante de l’UEJE : Al-Bina (Mouvement d’édification nationale) dirigé par Ahmed Dane, un « ancien » du MSP ; et le moins voyant, la non-implication – intentionnelle ? – dans cette « dynamique de retour aux sources» des formations de deux personnalités issues de la mouvance islamiste : le TAJ d’Amar Ghoul, un autre ancien du MSP, et le FAN (Front de l’Algérie nouvelle) de Djamel Benabdessalam, un ancien d’Ennahda originel. Cette perspective d’une pérennité et d’un approfondissement des divisions qui ont toujours caractérisées la mouvance islamiste dans notre pays, dévoile a contrario les véritables motivations à l’origine des actions de regroupement dans lesquelles se sont impliquées certaines de ses composantes. Nombre d’observateurs de la scène politique nationale n’écartent pas la possibilité que celles-ci procèdent du lancinant souci de la plupart des protagonistes de ces actions d’assurer la survie de leurs formations ; dans leur majorité, de faible envergure. Qui de ce fait sont sérieusement menacées dans leur existence par les dispositions de l’Article 94 de la loi organique relative au régime électoral, promulguée en août 2016 dans le sillage de l’adoption, en février de la même année, de la nouvelle Constitution ; des dispositions que peu des protagonistes des deux événements susmentionnés, pris isolément, peuvent satisfaire. D’où leur implication empressée dans les regroupements annoncés. Des regroupements nés, fait qui mérite d’être signalé tant il corrobore à la perspective précitée, des décombres de l’AAV (Alliance de l’Algérie Verte) : les composantes de cette dernière, mise sur pied au lendemain du retrait du MSP de l’Alliance présidentielle – à laquelle participaient également le FLN et le RND – se trouvent aujourd’hui dispersées : le MSP s’est lié au FC d’Abdelmadjid Menasra, Ennahda a rejoint l’UEJE et El Islah a décidé de continuer l’aventure en solo. Un choix qui, à l’évidence, s’est imposé à ses dirigeants : leurs « collègues » des autres formations ne voulant pas, semble-t-il, s’encombrer d’un parti chroniquement en crise. Sauf que les calculs électoralistes ne sont pas les seuls à expliquer l’engagement des dirigeants islamistes dans le processus en cours de recomposition de leur mouvance. Si pour le leader actuel du FJD et, probablement, futur de l’UEJE, la formation de celle-ci s’inscrit dans la perspective d’une opposition plus franche au pouvoir, pour une bonne partie des dirigeants du MSP et du FC, leur rapprochement s’inscrit dans la perspective, aujourd’hui non déclarée, d’un retour prochain dans le giron de ce même pouvoir ; une perspective, qui est celle d’Abou Djerra Soltani et d’Abdelmadjid Menasra, qui présuppose l’éjection préalable d’Abderrezak Mokri du poste de président du MSP. Ce qui est tout un programme.
Mourad Bendris