StratFor: L’Algérie doit courir le risque de se défaire de son statuquo économique
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DIA-18 avril 2017: L’Algérie doit courir le risque de se défaire de son statuquo économique, mais ce risque est plutôt interne, selon une analyse récente de StratFor, Strategic Forecasting, une plateforme leader de renseignements géopolitiques. « Au cours des deux dernières années, les dirigeants algériens ont montré leur volonté de mettre en œuvre des réformes »impopulaires », en particulier celles qui visent les subventions aux carburants et les taxes », indique l’article de StratFor, en gonflant la taxe de vente nationale de 15 à 17%, des mouvements de protestations dans plusieurs villes ont été enregistrés. Donc le premier risque étant de créer une quelconque instabilité, le pays s’en est sorti haut les mains du printemps arabe, et c’est justement le premier frein à toute réforme, « si le gouvernement approfondit sa volonté de réduire les subventions et augmenterait les impôts, les manifestations pourraient certainement se développer et se propager ». Bien que le gouvernement cherche à réduire progressivement les 45 milliards de dollars de subventions massives, « les citoyens algériens sont mécontents de l’effet que les compressions auront sur leurs propres carnets et sur leur niveau de vie ».
Autre risque cité, la réaction des réseaux de patronage: « Le gouvernement a également rencontré des pressions de la part de l’élite dirigeante », affirme ladite analyse qui évoque explicitement une élite dirigeante autre que le gouvernement. Alors qu’Alger se déplace pour moderniser son secteur de l’énergie, « et, ce faisant, perturber les réseaux de favoritisme retranchés. Des hauts fonctionnaires ont pris des mesures pour s’assurer que les réformes n’affectent pas leur accès à la richesse de l’Etat ». En soulignant que, « une partie du problème est que la restructuration de l’industrie énergétique menacerait les réseaux de patronage qui ont été construits autour du géant algérien du pétrole et du gaz naturel Sonatrach ». Mais ils ne font que retarder l’inévitable, car en dépit de ces manœuvres, deuxième frein aux reformes économiques, « le pays ne peut pas protéger le statu quo pour beaucoup plus longtemps. »
Avec moins de pétrole disponible pour l’exportation, les recettes du gouvernement ont été durement touchées. Les dirigeants se sont hâtés d’investir dans les schistes bitumineux et dans les projets de récupération améliorés afin de lutter contre la baisse de la production de pétrole, mais jusqu’à présent, ils n’ont guère réussi à faire tourner le secteur de l’énergie. « Pendant ce temps, les craintes d’Alger de relancer les troubles en révisant les normes économiques du pays depuis longtemps ont augmenté, l’Algérie a maintenu un parcours assez stable au cours des deux décennies écoulées depuis la fin de sa sanglante guerre civile.
Malgré des problèmes de santé graves et persistants, le président Abdelaziz Bouteflika a maintenu son siège au pouvoir. Les prochaines élections législatives du pays – les sixièmes depuis l’adoption par l’Algérie d’un système politique multipartite en 1989 – ne permettront pas à l’assemblée législative de poser un défi plus efficace au leader de longue date et à son entourage ».
L’article de StratFor estime, par ailleurs que, l’Algérie n’arrive pas à diversifier son secteur financier avec la mise en œuvre de la finance islamique, « l’ensemble du secteur bancaire algérien est malheureusement hors du contact avec les normes bancaires modernes, et sa banque centrale a la réputation d’être l’une des institutions les plus opaques de son genre dans le monde ». Dans l’espoir de contourner ces questions tout en attirant les investissements nécessaires, les autorités algériennes ont proposé un plan d’émission d’obligations sans intérêt. Cela apporterait le financement immédiat dont le gouvernement a besoin sans le désigner comme un instrument de financement islamique.
Avec la chute des prix du pétrole, Alger a été contraint de drainer ses coffres pour continuer de payer ses importations, faisant passer son déficit budgétaire à un niveau record de 16,4% du produit intérieur brut en 2015. Toutefois l’Algérie « détient toujours une énorme quantité de richesse pétrolière, affichant un PIB par habitant supérieur à celui du Maroc, mais les niveaux élevés d’inégalité des revenus continuent de peser sur le pays ».
La nouvelle constitution du pays, mise à jour au début de l’année dernière, vise à améliorer le climat des affaires en interdisant la formation de nouveaux monopoles, « néanmoins, l’imprécision des décrets n’inspire pas confiance dans la capacité du gouvernement à les voir passer ». Preuve de ce climat malsain des affaires, l’article citera cette mémorable affaire, « après tout, l’Algérie est réputée pour avoir dévoyé l’un des projets d’infrastructures les plus coûteux dans le monde, l’autoroute Est-Ouest, et finalement tripler le coût prévu de 6 milliards de dollars avec une greffe rampante »
Alger devra canaliser une partie de ses richesses pétrolières pour diversifier l’économie, même si elle maintient les programmes de dépenses sociales et les industries d’État en place, « il maintiendra également ses dépenses de défense, que le gouvernement ne veut pas réduire au milieu de sa rivalité avec le Maroc ».
Le gouvernement a plongé dans ses réserves considérables pour payer les factures et soutenir le dinar algérien, avec l’effet secondaire malheureux de stimuler l’inflation. Dans un effort pour stopper le saignement, Alger a récemment réduit ses dépenses de 14 pour cent, approfondissant la réduction de 9 pour cent soulignée dans le budget de l’an dernier. « En 2017 seulement, l’Algérie tentera de réduire ses importations de 5 milliards de dollars, en conformité avec les plus de 10 milliards de dollars d’importations qu’il a réduits au cours des deux dernières années. Bien que l’Algérie ait l’intention de remédier à la situation à long terme en investissant dans la croissance au-delà du secteur pétrolier, elle a tardé à poursuivre son plan ».
L’Algérie est entrain de réorganiser « prudemment » son économie, et abandonner progressivement sa préférence historique pour l’isolement, en recherchant les investisseurs étrangers, un changement qui pourrait un jour conduire à une politique étrangère plus ouverte aussi, indique l’article de StratFor.
Yasmine Yahia