Un historien français déplore le silence de Hollande et Macron sur les massacres du 8 mai 1945
DIA-08 mai 2020: Le silence des autorités françaises sur les centaines de milliers d’Algériens massacrés en 1945 et au cours de la Guerre de libération nationale entre 1954 et 1962, a été déploré par l’historien français Olivier Le Cour Grandmaison.
A l’occasion de la commémoration du 75ème anniversaire des massacres du 8 mai 1945 en Algérie, commis par la France coloniale, cet historien spécialiste des questions de citoyenneté sous la Révolution française et des questions en relation avec l’histoire coloniale, a regretté, dans une contribution publiée sur son blog, « le silence de la France sur ces massacres », précisant que les « descendants de ces victimes attendent toujours la reconnaissance de ces crimes » par la France.
En ce sens, il a relevé que « ni François Hollande (ex-président de la République française), ni Emmanuel Macron (actuel Président) ne se sont engagés dans cette voie », rappelant à cet effet que Macron avait déclaré, au cours d’un voyage en Algérie en tant que candidat à l’élection présidentielle (février 2017), sur une chaîne de télévision privée algérienne, que « la colonisation était un crime contre l’humanité ».
Comme ses prédécesseurs, une fois installé à l’Elysée, Macron « s’est bien gardé de réitérer ses dires », a commenté M. Le Cour Grandmaison.
Il a toutefois relevé que Macron avait admis en 2018 que le jeune mathématicien et militant du Parti communiste algérien, Maurice Audin est « mort (1957) sous la torture du fait du système institué alors en Algérie par la France », regrettant que « cet acte majeur n’a été suivi d’aucun autre » de la part de Macron.
Il a ainsi estimé qu’il s’agit d’une « classique tactique » consistant à « céder sur un point pour mieux préserver l’essentiel ».
Relevant que le président français Emmanuel Macron adopte une politique « disruptive », il a encore rappelé que le Conseil de Paris avait adopté à l’unanimité en 2015, un vœu dans lequel les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata sont qualifiés de « crimes de guerre » et de « crimes d’Etat ».
Selon cet historien, l’ouverture de toutes les archives et la création d’un lieu du souvenir à la mémoire des victimes sont également demandées, précisant qu’à Marseille, une plaque rappelant ce qui s’est passé en Algérie, a été apposée en juillet 2014, et à Givors, un square à la mémoire des victimes des massacres du 8 mai 1945 a été inauguré grâce à la persévérance d’une élue au Conseil municipal, Amelle Gassa.
« Des avancées locales significatives et courageuses d’un côté, la pusillanimité, le déni et le mépris toujours reconduits de l’autre », a-t-il encore commenté.
Dans le même contexte, Le Cour Grandmaison a ajouté que l’ambassadeur de France en Algérie, Hubert Colin de Verdière, avait évoqué en 2005 à Sétif, « une tragédie inexcusable », puis son successeur, Bernard Bajolet, en visite à Guelma, avait souligné, trois ans plus tard, « la très lourde responsabilité des autorités françaises de l’époque dans ce déchaînement de folie meurtrière » qui a fait des milliers de victimes innocentes.
Il a ajouté, en citant les propos de Bernard Bajolet, que « ces massacres sont une insulte aux principes fondateurs de la République française » et ont « marqué son histoire d’une tâche indélébile ». « Depuis, aucune déclaration des plus hautes autorités de l’Etat n’est venue confirmer ces propos », a-t-il commenté.
Toujours dans le même contexte et comparant la France aux autres anciennes colonies ayant reconnu les crimes perpétrés dans leurs possessions respectives, il a considéré qu’elle (la France) est « en retard », citant ainsi l’Allemagne pour le génocide (1904) des tribus Hereros et Namas dans les territoires du Sud-Ouest africain (actuelle Namibie) et de la Grande-Bretagne pour les massacres commis pour écraser le soulèvement des Mau-Mau au Kenya, dans les années 1950.