Amar Belhimer déplore les pratiques anti-professionnelles entachant le métier de journaliste
DIA-08 août 2020: Les acteurs du champ médiatique en Algérie sont invités à réfléchir aux moyens de remédier à certaines pratiques anti-professionnelles entachant l’exercice du métier de journaliste dans notre pays, a indiqué, samedi, le ministre de la Communication, porte-parole du Gouvernement, Ammar Belhimer.
« Dans le souci d’améliorer l’exercice du journalisme en Algérie, le ministère de la Communication invite l’ensemble des acteurs du champ médiatique national à lancer une réflexion collective, sérieuse et constructive, visant à identifier les voies et moyens de pallier certaines pratiques anti-professionnelles entachant l’exercice du métier de journaliste dans notre pays », a souligné le ministre dans un entretien à l’APS.
Pour le ministre « l’usage inconsidéré des pseudonymes ou encore l’ambivalence de la relation de travail avec les organes employeurs » figurent « parmi les plus manifestes de ces pratiques anti-professionnelles ».
Il s’agit également de « réfléchir pour trouver des solutions au phénomène émergent communément appelé « pages confidentielles », ainsi qu’au foisonnement des articles non signés, » provoquant le doute chez le lecteur autour de leur authenticité et de leur source ».
Pour lune Charte algérienne consensuelle d’éthique et de déontologie
Il a invité, à ce propos, les intervenants du champ médiatique à « favoriser, par attachement au principe d’autorégulation, une meilleure pratique du journalisme en Algérie par la rédaction d’une Charte algérienne consensuelle d’éthique et de déontologie pour régir le secteur de la presse ».
Cette Charte constituera ainsi, a-t-il souligné, « une référence pour les futurs Conseil et autorités, prévus par le Code de l’information de 2012 et qui n’ont pas encore vu le jour ».
Il a rappelé, dans ce contexte, que l’Autorité de régulation de la presse écrite, « autorité indépendante, jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie financière », sera chargée notamment « d’encourager la pluralité de l’information, de veiller à la diffusion et à la distribution de l’information écrite à travers tout le territoire national ».
Ses missions consistent également, a-t-il ajouté, à « veiller à la qualité des messages médiatiques, ainsi qu’à la promotion et la mise en exergue de la culture nationale dans tous ses aspects, à veiller à l’encouragement et à la consolidation de la publication et de la diffusion dans les deux langues nationales par tous les moyens appropriés, ainsi qu’à la transparence des règles économiques de fonctionnement des entreprises éditrices ».
Pour l’émergence d’un « journalisme professionnel » par une « formation de qualité »
Seul un travail de « réflexion et de concertation responsable » entre la « tutelle » et l’ensemble de la corporation (employeurs, journalistes, experts), peut permettre d’atteindre l’objectif tant escompté, consistant à contribuer à l’émergence d’un journalisme professionnel en Algérie, a estimé le ministre.
« Une formation de qualité, au sein des universités et établissements spécialisés, ainsi qu’un encadrement efficient et éclairé, au niveau des médias, mettant en avant la sacralité du respect de l’éthique et de la déontologie, sont l’autre condition sine qua non pour la + production+ d’un journaliste consciencieux et professionnel », a insisté le ministre.
Pour lui, « il est clair que l’expérience journalistique algérienne, au temps du parti unique ou après le 5 octobre 1988, est relativement jeune, en comparaison avec celles de pays pionniers comme les Etats-Unis, la Grande Bretagne, l’Allemagne ou d’autres pays de traditions démocratiques établies ». Cela dit, a-t-il souligné, « les règles d’éthique et de déontologie sont identiques, immuables et doivent constituer le balisage que nul n’a le droit de négliger ou de bafouer ».
Même « l’absence d’un cadre juridique ou de loi écrite, régissant l’exercice du métier de journaliste dans ses moindres détails, ne peut, en aucun cas, constituer un prétexte pour la transgression des règles de bonnes pratiques, émanant de l’essence même du journalisme et de sa noble mission sociétale », a-t-il également estimé
S’agissant des expériences étrangères, et de leur capacité à nous inspirer, ainsi que de la part de l’acquis national en la matière, le ministre de la Communication, porte-parole du Gouvernement, a indiqué que si, en Algérie pays, il n’existe pas encore de traditions établies régissant l’éthique et la déontologie à même d’encadrer l’expression journalistique, des éléments de droit comparé autorisent le rapprochement ».
Il a aussi indiqué, à ce propos, qu’il était « tout de même important de rappeler que l’Algérie a, elle aussi, enregistré quelques tentatives visant à asseoir des traditions en matière d’éthique journalistique, tout en tenant compte des spécificités sociales et professionnelles locales ».
A titre d’exemple, a-t-il ajouté, « après les premiers balbutiements sur la question datant du Mouvement des journalistes algériens entre 1988 et 1990, le 13 avril 2000, une Charte d’éthique et de déontologie des journalistes algériens, avait vu le jour ». Elle se voulait être, a-t-il souligné, le « premier document du genre prévu par le code de l’information de 1990, à fixer les devoirs et les droits de la corporation, sur lesquels veillait un Conseil supérieur composé de professionnels du secteur, élus par leurs pairs ».
Pour ce qui est de l’usage inconsidéré des pseudonymes, le porte-parole du Gouvernement a souligné qu’il était « impératif de rappeler qu’aucune considération, ni éthique, ni juridique, ne plaide en faveur de l’anonymat dans l’exercice du journalisme ».
Au plan éthique, « s’il est possible d’admettre la généralisation, puis la banalisation de l’usage des pseudonymes comme moyen de survie en période de chasse aux journalistes, comme ce fut le cas pendant la décennie noire », ce ne doit pas être le cas dans le contexte actuel de libre exercice de la profession, où la pratique est attribuée à des « plumitifs de l’ombre » et assimilée à une « clandestinité identitaire ».
Ainsi, a souligné le ministre, « l’utilisation de pseudonyme ou le fait de ne pas mentionner son nom est soumis à une condition principale : le/la responsable de publication doit connaitre et conserver le nom de la personne ayant rédigé l’article publié anonymement ».
Belhimer déplore le foisonnement des articles non signés et des pseudonymes
Abordant, précisément, la question des articles non signés, le ministre a estimé que leur foisonnement est « une couverture à la surcharge de travail qui pèse sur les quelques professionnels chargés de compenser le manque de personnel dans des rédactions squelettiques, en passant d’une spécialité à une autre, sans travail de terrain, d’enquête ou de reportage ».
Le ministre s’est dit « convaincu » qu »‘il est nécessaire de revoir l’utilité des pages dites +confidentielles+ » que nombre journaux « s’adonnent, depuis quelques années, à publier quotidiennement, favorisant souvent le sensationnel au détriment du devoir sobre d’informer ».
Des pages, a-t-il relevé, qui « agencent des bouts d’articles, illustrés par des caricatures ou des photos d’archives, qui s’apparentent plus à de la rumeur et au commérage qu’à de l’information à vocation publique. Ni le nom de l’auteur, ni la source n’y figurent ».
Dans le cas où l’information est erronée ou à moitié vraie, nécessitant donc une correction, les journaux concernés par cette pratique, peu ou pas professionnelle, « se contentent de publier un minuscule erratum au bas d’une des pages les moins lues », a-t-il également relevé.
Des « pigistes » et freelancers s’improvisent correspondants de médias étrangers
Pour ce qui concerne l’ambivalence de la relation de travail avec certains organes employeurs étrangers, le ministre de la Communication a indiqué que certains journalistes s’installent comme « correspondants de fait » – non accrédités selon les procédures en vigueur – d’organes étrangers, et entretiennent une sorte de « loi du fait accompli qui les expose à plusieurs risques dont le premier, et non des moindres, est qu’ils ne sont pas reconnus comme correspondants ».
Ils recourent aux usages de « pigistes », Freelancers, collaborateurs pour contourner l’article 81 de la loi organique n12-05 du 12 janvier 2012 relative à l’information: « Les journalistes professionnels exerçant pour le compte d’un organe de droit étranger doivent obtenir une accréditation ».
Se disant ainsi Freelancers ou cachetiers, des journalistes algériens « entretiennent des relations de travail, non conformes sur le plan légal, avec des médias étrangers, et ne sont dotés « ni de contrats conformes, ni de carte professionnelle délivrée par l’employeur offshore, ni de bureau de représentation ».
Ces journalistes en question doivent savoir, a également souligné le ministre, que les pays des médias qui les emploient, « n’auraient jamais toléré de telles pratiques sur leurs sols respectifs. Seuls les correspondants officiellement accrédités peuvent y travailler. Alors pourquoi le tolérer lorsqu’il s’agit de notre pays ? », a conclu le ministre de la Communication, porte-parole du Gouvernement.