Covid-19 : de retour à la Maison Blanche, Trump retire son masque
DIA-06 octobre 2020: L’optimisme prudent, affiché depuis quelques heures par les médecins et par son entourage, était donc justifié. Après avoir passé trois nuits à l’hôpital Walter Reed, près de Washington, Donald Trump est rentré à la Maison Blanche lundi soir. Dès son retour, il a retiré son masque et appelé les Américains à «sortir» avec prudence, après avoir promis de reprendre bientôt sa campagne électorale.
Dans une mise en scène savamment orchestrée, le président des États-Unis est descendu de l’hélicoptère qui l’a amené de l’hôpital, a traversé la pelouse en saluant les caméras qui l’attendaient avant de grimper les marches vers le balcon de sa résidence. Là, l’air malgré tout crispé, il a ajusté sa veste, retiré son masque et levé les pouces. Un geste de défi pour un dirigeant qui pendant des mois a affiché son dédain pour ceux qui se couvrent le visage pour se protéger du Covid-19.
Donald Trump a affirmé se «sentir très bien» et «mieux qu’il y a 20 ans». «N’ayez pas peur du Covid. Ne le laissez pas dominer votre vie. Nous avons développé, sous l’administration Trump, de très bons médicaments et connaissances», a-t-il ajouté dans son tweet. «Sortez, soyez prudents», a même exhorté celui qui est accusé d’avoir minimisé la pandémie et dont la gestion est critiquée de toutes parts.
Cette sortie peut paraître hâtive pour un patient, qui présente deux facteurs de risque : ses 74 ans et son obésité clinique. Il ne s’agit toutefois pas d’un retour à la normale, comme le président est tenté de le présenter. Et l’on ignore s’il souffre de séquelles.
Son équipe médicale a précisé lundi qu’il n’est «peut-être pas encore complètement tiré d’affaire». «Nous sommes optimistes mais attentifs. C’est l’inconnu concernant les traitements que le président a pu recevoir. Il s’agit de voir si l’état de santé reste le même jusqu’à lundi». Surtout, son médecin, le docteur Conley, a expliqué que le président ne pourrait pas retourner sur le terrain avant de ne plus être contagieux, laissant entendre qu’il l’était encore. Il a évoqué un délai moyen de dix jours, mais sans préciser exactement à partir de quand.
Donald Trump devrait donc encore rester pour un temps confiné à la Maison-Blanche pour sa convalescence et suivre son traitement. La demeure présidentielle abrite une unité médicale sophistiquée. Sous la houlette de Sean Conley, docteur en ostéopathie, elle comprend une vingtaine de praticiens et dispose d’une unité d’urgences et de traumatologie, mais ne dispose pas de tous les équipements d’un hôpital.
Le leader américain reçoit actuellement plusieurs traitements très puissants, comprenant de la dexaméthasone, un corticoïde efficace contre les formes graves de Covid, l’antiviral Remdesivir ainsi qu’un cocktail expérimental de la société Regeneron. La décision de sa sortie était politiquement délicate : la précipiter porte le risque d’une nouvelle hospitalisation en cas de dégradation de son état. Mais un séjour prolongé aurait aussi pu laisser penser que le patient, connu pour son aversion des hôpitaux, ne se portait pas aussi bien qu’espéré.
Couacs à répétition
La sortie du président américain vient ponctuer une série de couacs qui ont pu faire douter de son état de santé réel. Dimanche, il avait déjà tenté de dissiper tout signe de faiblesse. Donald Trump s’est offert une sortie inopinée, et vivement critiquée, de l’hôpital Walter Reed, où il est soigné depuis vendredi, pour saluer les « grands patriotes » réunis devant l’établissement, et à travers eux, donner un gage de vitalité à ses électeurs, à moins d’un mois de la présidentielle. C’est à bord d’une Chevrolet blindée que le président masqué est apparu brièvement devant les grilles de l’hôpital militaire pour applaudir quelques dizaines de supporters, le long d’une artère vidée de son trafic habituel.
Donald Trump avait annoncé son éphémère escapade quelques minutes plus tôt dans un message vidéo enregistré et posté sur Twitter. « C’est une expérience très intéressante (…) J’ai appris beaucoup sur le Covid. Je l’ai appris en faisant l’expérience moi-même. C’est l’école de la vie », a-t-il ajouté, alors qu’une majorité d’Américains (65%) jugent qu’il aurait pu éviter d’attraper le Covid « s’il avait pris le virus plus au sérieux », selon un sondage Ipsos pour Reuters, publié dimanche.
Cet épisode nourrit le flot de commentaires sur la gestion hasardeuse de la pandémie par la Maison-Blanche. Il ponctue aussi une série de communications contradictoires. À mesure que la chaîne de contamination est reconstituée, des informations laissent penser que l’Administration Trump n’a pas joué la transparence. Selon plusieurs médias, le président aurait en réalité reçu dès jeudi soir un premier test rapide positif, au retour d’un meeting dans son golf de Bedminster, dans le New Jersey, à laquelle 206 personnes ont participé. Or la Maison-Blanche n’a communiqué que le lendemain soir, après la confirmation d’un test PCR.
Depuis l’hospitalisation du président vendredi, son médecin personnel avait aussi été accusé de peindre un tableau bien plus positif que la réalité. Sean Conley a ainsi reconnu dimanche que Donald Trump avait connu des épisodes de forte fièvre et avait vu son oxygène baisser vendredi matin, ce qu’il a tu dans son briefing la veille. Il a aussi admis que le patient avait eu besoin d’une supplémentation en oxygène vendredi, justifiant une hospitalisation, et qu’un autre épisode de baisse de la saturation était survenu samedi matin. Interrogé sur ses omissions, le médecin a affirmé qu’il préférait projeter une image « optimiste ».