Un musulman est sur la place : note d’espoir ou sauve qui peut ?  

DIA- 12 mai 2016: Après le couple constitué d’un « métis » et d’une descendante d’esclave, à la tête de l’Etat le plus puissant du monde, voilà qu’un autre personnage vient rejoindre la liste des « outsider ». La Liste de ces hommes et femmes que l’on n’attendait pas vraiment. Qui aurait cru que l’élection d’un maire pouvait autant susciter à commentaires et à étonnements ?  Je suis surtout étonnée que l’on soit étonné qu’un homme, musulman puisse se présenter à des élections et les remporter ! Qu’est ce que  sous-entend cet étonnement ? Il sous-entend beaucoup de choses. A demi-mots, il avoue, confirme et illustre la discrimination qui se fait sous couvert. Grâce à cet épisode électoral britannique bien des masques tombent et des cris du cœur inconscients se font jour et s’affirment où l’on ne s’y attendait pas !

Allumez la télévision et vous verrez titré : «  le musulman Sadiq Khan, annoncé favori ! ». Le MUSULMAN ! Vous rendez vous compte qu’à aucun moment, on n’a relevé ou annoncé avec autant de véhémence la confession religieuse de ses opposants ? A aucun moment on a pas présenté cet homme comme un simplement citoyen ! Certains le présente comme le symbole  du rêve à l’anglaise faisant de cet anglo-pakistanais  tea-timisé, une marque d’ouverture tandis que d’autres un exemple monstrueux annonçant les prémices de la colonisation muslimique qui guette toute l’Europe si elle ne prend pas garde. Sadiq Khan le candidat aux multiples qualificatifs et facettes !  Il est avant tout porteur de toutes les couleurs du danger ! Musulman, Pakistanais, travailliste soutenant les extrémistes… ceci est fait, bien sûr,  dans la visée de remettre en exergue le climat de peur et de tension qui régnait suite aux attentats du 7 juillet 2005. Dès lors, nous nous souvenons que la capitale de la Grande Bretagne fut qualifiée de  Londonistan, déplorant ainsi la liberté octroyée à la différence, à l’opinion et à la confession de chacun. Les opposants du maire «musulman », puisqu’il faut l’appeler ainsi, ne manque pas de rappeler ce temps de deuil qui égare les consciences. Des consciences marquées et meurtries par ce qu’ils appelleront le Seven Seven.

Que ces opposants s’en donnent à cœur joie et y vont à tambour battant, c’est de l’ordre du normal car les enjeux sont importants mais que les médias français se fassent le relais une telle déformation de la réalité, cela me sidère et encore une fois, cela m’oblige à me questionner sur la position des journalistes, sur leur but, sur leur éthique, sur leur pertinence, sur leur sens du devoir poussé à un tel degré de précision, au point qu’ils ont omis de nous donner une information capitale de sa vie intime qui manque cruellement au tableau dépeint.   Sadiq Khan est circoncis et ils ne nous l’ont pas dit ! Ils ont manqué à leur devoir en oubliant de le mentionner c’est pourquoi je relève que leur souci de nous informer est orienté par je ne sais quelle directive mais certainement pas celle de l’objectivité.

Encore une fois, je déplore le positionnement et la responsabilité de certains médias dans la diffusion d’idées discriminantes qui entrent  insidieusement dans les foyers et les esprits afin de les formater à l’habitude d’associer le mot MUSULMAN à DANGER. Je ne peux croire que cela est fait sans conscience de cause. Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Est ce réellement  la course au sensationnalisme ou  un autre but qui poussent à de tels agissements et à un tel déni de leur prérogatives originelles ?

Il est heureux que beaucoup de gens ont de bons filtres anti-formatage, et visiblement Londres en compte au moins 44%. Cette petite note d’espoir va faire oublier l’étroitesse d’esprit de gens censés représenter la République et sa capacité à accueillir en son sein des gens venant de divers horizons qui travaillent pour elle.

Je crois qu’au fond la peur de l’autre existera toujours, l’appréhension aussi, et je pourrais faire de long discours sur les propos exagérément racistes et discriminatoires d’un Robert Ménard, qui a pignon sur rue sans jamais être inquiété, mais je ne le ferai pas ! Pourquoi je ne le ferai pas ? Parce que simplement, cela serait lui accorder trop d’honneur… trop de publicité surtout pour des discours délavés visant à rassurer une population beaucoup plus inquiète que vraiment raciste. La bonne vieille recette consistant à jouer sur les peurs est aujourd’hui trop vieillie par le temps au point que les extrêmes tentent de se renouveler en faisant appel à cette population qu’il discrimine pourtant. Le nouveau crédo, des Le Pen et des Ménard du monde entier, c’est d’essayer d’encore exister dans un monde qui avance plus vite que leurs idées. Comme cela doit être effrayant pour eux de voir ce nouveau monde en marche qui va bientôt les transformer en vieux papiers mâchés, jaunis et poussiéreux, témoins de moments peu glorieux, d’un temps si lointains, qui fait sourire à son évocation.

A vrai dire ces pauvres gens sont utilisés pour « vendre » car, comme dans la vie en général, on aime le spectacle offert par les « grandes gueules puantes » qui aident à paraitre meilleur. Et ainsi, finalement, du moins je l’espère, les gens les écouteront vaguement en pensant : « quand je me regarde, je me désole, quand je me compare je me console ».

Avant d’avoir accueilli des musulmans, Londres a vu défiler des chrétiens, des protestants, des Baptistes, des Jésuites, des bouddhistes, des juifs, des punks.

La note d’espoir l’emporte sur les fausses notes : le maire de Londres est élu, la reine mère à un nouveau chapeau et Big Ben ne deviendra pas un minaret.