Le Conseil d’Etat turc décide de transformer « La basilique Sainte-Sophie » en mosquée: la colère de la France et de l’Unesco
DIA-11 juillet 2020: On connaît donc le nom de la 3272e mosquée d’Istanbul: la «mosquée Sainte-Sophie». Examinant la plainte d’une association musulmane, le conseil d’État turc a révoqué vendredi le statut de musée de l’édifice millénaire. Le président Recep Tayyip Erdogan peut désormais se prévaloir d’une décision de justice pour accomplir le rêve des musulmans turcs: reconquérir, religieusement et politiquement, ce symbole d’Istanbul.
Une décision qui a déplu au gouvernement français qui «déplore» la décision des autorités turques de transformer l’ex-basilique Sainte-Sophie d’Istanbul de musée en mosquée, a déclaré vendredi le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian. «La France déplore la décision du Conseil d’État turc de modifier le statut de musée de Sainte-Sophie et le décret du Président Erdogan la plaçant sous l’autorité de la direction des affaires religieuses. Ces décisions remettent en cause l’un des actes les plus symboliques de la Turquie moderne et laïque», a déclaré le ministre, selon un communiqué. «L’intégrité de ce joyau religieux, architectural et historique, symbole de la liberté de religion, de tolérance et de diversité, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, doit être préservée», a ajouté le ministre. Cette déclaration vient s’ajouter aux diverses condamnations ou regrets exprimés dans le monde après la décision du président turc Recep Tayyip Erdogan, conforté par une décision de la justice administrative, de transformer en mosquée ce monument mondialement connu et inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.
Dans le même temps, la française Audrey Azoulay, directrice générale de l’UNESCO, a également «regretté vivement la décision des autorités turques, prise sans dialogue préalable, de modifier le statut de Sainte-Sophie. Elle a fait part ce soir de sa profonde préoccupation à l’ambassadeur de Turquie auprès de l’Unesco», indique un communiqué de l’Unesco transmis vendredi soir à l’AFP. «Nous sommes déçus par la décision du gouvernement turc de changer le statut de Sainte-Sophie», a affirmé pour sa part la porte-parole de la diplomatie américaine, Morgan Ortagus. «Nous prenons acte de l’engagement du gouvernement turc de garantir un accès à Sainte-Sophie à tous les visiteurs, et nous avons hâte de voir ses plans de gestion de Sainte-Sophie pour qu’elle reste accessible à tous sans entrave», a-t-elle ajouté. Une ingérence diplomatique française et de l’UNESCO qui réagissent d’une manière maladroite dans une affaire culturelle interne turque et surtout contre la volonté du peuple turc, qui a lui même exigé la transformation de la basilique en Mosquée.
La basilique Sainte-Sophie (du grec Hagía Sophía, qui signifie « sagesse de Dieu », « sagesse divine », nom repris en turc sous la forme Ayasofya) est une grande basilique chrétienne de Constantinople construite dans un premier temps au IVe siècle, puis reconstruite bien plus grande au VIe siècle, sous l’empereur byzantin Justinien, où elle acquit sa forme actuelle. Lorsqu’il conquiert Constantinople en 1453, le sultan Mehmet II en fait aussitôt une mosquée, sans détruire pour autant son héritage chrétien. En 1934, onze ans après la chute de l’Empire ottoman et l’avènement de la République, son premier président, Mustafa Kemal Atatürk, «l’offre à l’humanité» en la transformant en musée. Depuis des décennies, les panneaux circulaires clamant les noms d’Allah et de son prophète Mohammed répondent aux mosaïques du Christ et de la Vierge. Souvent surnommée la Grande Église, la basilique est dédiée au Christ, « sagesse de Dieu », selon la tradition théologique chrétienne. La dédicace du sanctuaire est célébrée le 25 décembre. En 2018, ce monument était le deuxième musée le plus visité de Turquie avec 2 890 873 de visiteurs.
Le 10 juillet 2020, un décret du Conseil d’État décide de sa transformation à nouveau comme mosquée.
Amel Bouchaib